Hausse de la taxation sur le diesel
En France, le gazole, aussi appelé diesel, est le carburant issu du pétrole qui affiche les prix les plus bas dans les stations service. Or, quand on regarde le prix hors taxes des carburants, on s'aperçoit qu'il est parfois plus cher que le Super 95 voire même que le Super 98. Ceci s'explique par la différence de taxation du gazole par rapport aux essences, comme l'autorise l'Article 265 du Code des Douanes : " Une réfaction peut être effectuée sur les taux de taxe intérieure de consommation applicable au [...] gazole [...]. A compter du 1er janvier 2006, le montant de cette réfaction est de [...] 1,15 euro par hectolitre pour le gazole ".
Mais pourquoi existe-t-il cette distinction ?
Suite aux chocs pétroliers, de nombreux pays européens, dont la France, avaient fait le choix d'imposer une moindre taxation sur le diesel afin de " réduire les consommations de carburants dans le secteur du transport routier afin d'améliorer la sécurité d'approvisionnement et l'indépendance énergétique de la France ", rappelle Delphine BATHO, Ministre de l'Ecologie, dans sa lettre au Premier Président de la Cour des Comptes.
Particules fines et NO2, "agents cancérogènes certains pour l'homme".
S'il y a débat sur les véritables économies apportées par un véhicule à moteur diesel, ce qui est certain, c'est qu'il émet des particules fines et du dioxyde d'azote (NO2). En plus de la considération des émissions de CO2, il est en effet indispensable de regarder les autres émissions. Le CIRC (Centre International de Recherche sur le Cancer), a publié en juin dernier un rapport intitulé Diesel engine exhaust carcinogenic et classe désormais les gaz émis par les moteurs diesel dans le groupe 1 (agents cancérogènes certains pour l'homme)*, rejoingnant entre autres l'amiante, le plutonium 239 et le radium 234.
Au début du mois de mars, la Ministre de l'Ecologie, a annoncé que le gazole posait un " problème de santé publique ". Ainsi, elle a annoncé la possibilité de réduire l'avantage fiscal dont bénéficiait jusque-là le gazole.
Rappelons qu'en 2010, la Commission Européenne avait menacé la France d'amende pour non-respect du seuil de pollution.
Un avantage fiscal épinglé par la Cour des Comptes.
Fin février 2013, Libération a publié le rapport de la Cour des Comptes sur les dépenses fiscales rattachées à la mission écologie, aménagement et développement durables et relatives à l'énergie du 17 décembre 2012 qui reproche notamment à la France de favoriser le gazole en fixant une taxe plus favorable sur ce carburant.
Bien que la Ministre de l'Ecologie ait insisté il y a moins de deux semaines que la possible révision de la taxation du gazole n'était pas un " sujet de recettes fiscales ", la Cour des Comptes évalue la perte de recettes fiscales pour l'année 2011 à 6,9G d'euros.
D'autre part, cette incitation à choisir le gazole au détriment des essences joue en la défaveur de notre balance commerciale. En effet, les rafineries française produisent insuffisamment de gazole et trop d'essence par rapport aux besoins actuels.
Quel impact sur le parc franaçais?
La France a connu une explosion des véhicules diesel ces dernières années et depuis 2007, ils sont aussi prédominants chez les particuliers. En 2012, ils représentaient près de 73% des ventes de neufs et 60% du parc des particuliers. Cette diésélisation du parc français a été déclenchée par l'écart entre le prix des carburants à la pompe, la plus faible consommation de ces véhicules par kilomètre parcouru (bien que l'écart tend peu à peu à se réduire) mais aussi le bonus-malus accordé à l'achat de voitures en fonction de leurs émissions de CO2.
A court terme, il est difficilement envisageable que tous les particuliers changent leurs véhicules et si une hausse des taxes sur le gazole est effectivement observée, cela pourrait rendre la mesure peu acceptable par les consommateurs, que ce soit les particuliers comme les professionnels. La Ministre de l'Ecologie suggère une redistribution des recettes supplémentaires dans un objectif d'accompagnement et de justice sociale. Cela se traduirait par exemple sous forme d'une "aide au remplacement des véhicules les plus émetteurs de particules ".
De plus, la fin du système de bonus-malus en 2010, les progrès faits sur la consommation des moteurs essence, les recherches sur les véhicules électriques et hybrides, les recherches sur les carburants alternatifs aux énergies fossiles,... pourraient à terme réinverser la tendance.
* En 1988, ils étaient classés dans la catégorie A2 (agents probablement cancérogènes pour l'homme).